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Alexandre à la bataille de Gaugamèles (1er octobre 331 av J.C.)

Batailles mémorables de l’histoire de l’Europe. Deuxième partie

Alexandre à la bataille de Gaugamèles (1er octobre 331 av JC)
Jan Brueghel l’Ancien, La Bataille de Gaugamèles, 1602. Coll. Musée Du Louvre. Domaine public.

Fils du célèbre Philippe de Macédoine, Alexandre hérite de ce dernier un royaume qui avait vaincu tant ses ennemis du nord, les Thraces, que ceux du sud, les cités-États helléniques, y compris les puissantes cités d’Athènes et de Thèbes battues à la bataille de Chéronée (338 av JC).

Contexte et personnage

Après l’assassinat de Philippe à l’été 336, Alexandre monte sur le trône et, dès l’année suivante, entreprend les dix années de campagne qui lui permettront de conquérir un gigantesque empire. Commençant par achever la pacification de la Grèce (Thèbes, la rebelle, est rasée définitivement à l’automne 335), Alexandre se tourne à partir de 334 vers le véritable but de ses ambitions, la conquête de la Perse, déjà projetée par son père. Selon ses biographes, on peut penser que ses motivations étaient tant de venger les invasions du Ve siècle que de vaincre une civilisation perse considérée comme un ennemi héréditaire, incarnant l’exact opposé de la civilisation hellénique en termes d’attachement à la liberté des peuples ; bref, il s’agissait de renverser l’empire achéménide pour garantir définitivement les libertés des Grecs.

Au printemps 334, après avoir traversé le Bosphore et être passé par le site de Troie afin d’honorer les héros homériques (dont il fut éminemment inspiré par son précepteur, Aristote), il commence par remporter la victoire du Granique, petit cours d’eau situé non loin de la côte derrière lequel s’étaient retranchées les troupes perses. Pacifiant ensuite toute l’Asie mineure (siège des cités portuaires de Milet et d’Halicarnasse), Alexandre bat l’armée perse commandée par le roi Darius en personne, à la bataille d’Issos. Dès lors, maître d’une bonne moitié de l’Empire, Alexandre profite des deux années qui suivent pour anéantir la puissance navale perse en Méditerranée et conquérir la Judée, puis la lointaine Égypte. En 331, de retour d’Égypte, il décide de supplanter définitivement Darius en allant le vaincre au cœur même de son royaume, en Mésopotamie. La rencontre décisive des deux armées a lieu juste à l’est de la ville actuelle de Mossoul, sur une plaine découverte que l’on dénomme Gaugamèles.

À l’époque de cette bataille, Alexandre a déjà atteint et même dépassé les ambitions que nourrissait son père. Doté d’une éducation princière (instruction dans les disciplines de la musique, de la poésie, de la chasse, de l’équitation et de l’art oratoire), élevé par son précepteur Aristote dans l’imaginaire des poèmes homériques et instruit des disciplines intellectuelles de son époque (géométrie, rhétorique…), Alexandre a démontré très tôt une aptitude certaine au commandement. Ainsi à la bataille de Chéronée, il commande la cavalerie et mène, sur le flanc gauche de l’armée macédonienne, une charge victorieuse contre l’armée coalisée des cités de Thèbes et d’Athènes. L’histoire le décrit par ailleurs comme un jeune homme à l’esprit et au physique avantageux, doté d’un caractère impétueux, fougueux et impatient, toutes qualités qui prédestinent celui qui se disait fils de Zeus à vivre l’un des destins les plus glorieux de l’histoire européenne.

La bataille

À Gaugamèles, le rapport de force s’établit largement en faveur de Darius, qui rassemble environ cinq fois plus de combattants qu’Alexandre. « Roi des rois », il dispose notamment d’une infanterie d’élite composée de mercenaires grecs, de chars équipés aux roues de longues faux tournantes, d’une quinzaine d’éléphants de guerre et d’une cavalerie à la fois lourde (cavaliers perses équipés de cottes de maille) et légère (cavaliers des steppes scythes et bactriens, habitués à vivre à cheval). En outre, parvenu sur place en premier, Darius a veillé à préparer le terrain à son avantage, allant jusqu’à faire enlever les broussailles et autres obstacles pouvant freiner les charges de sa cavalerie.

Bataille de Gaugamèles
Bataille de Gaugamèles et fuite de Darius, gravure de la fin du XVIIe siècle. Domaine public.

Tout laisse présager une victoire perse

Pourtant, au matin de la bataille, Alexandre, vêtu d’une simple tunique de lin blanc, épée à son flanc et casque à plumes blanches sur la tête, enfourche Bucéphale, son noir destrier, pour passer en revue le front de ses troupes et aller se placer sur son aile droite avec ses Compagnons, cavalerie d’élite dont les membres, issus de l’aristocratie macédonienne, lui sont attachés par un serment de fidélité personnelle. Le plan de Darius est à l’évidence de compter sur le caractère beaucoup plus étendu de sa ligne de troupes, comparé à celle des Macédoniens, pour déborder ces derniers sur leurs ailes et les prendre à revers. Il est donc vital que les ailes du dispositif grec tiennent bon et que le centre ne soit pas enfoncé par les chars, les éléphants perses ou plus sûrement par les bataillons de mercenaires grecs.

Les chars comme les éléphants s’avèrent inefficaces pour rompre la ligne macédonienne, notamment parce que, grâce à leur grande discipline, les rangs grecs s’ouvrent pour laisser passer leurs ennemis non sans avoir criblé, au passage, les équipages des uns et des autres de flèches et javelines.

Puis les troupes macédoniennes commencent à avancer dans un silence parfait qu’Alexandre leur a imposé afin de mieux entendre ses ordres tandis que, comme prévu, la cavalerie perse entame sa charge aux extrémités. À partir de ce moment, les versions divergent quelque peu sur le déroulement exact de la bataille. Selon certaines sources, c’est en exploitant une brèche ouverte dans le dispositif perse par la charge de leur cavalerie, qu’Alexandre peut s’y engouffrer, provoquant une rupture fatale des lignes ennemies. Pour d’autres, Alexandre mène, depuis son aile droite, une charge selon une trajectoire oblique qui prend Darius complètement au dépourvu. Motivé par le sens tactique d’Alexandre mais aussi par la nécessité de venir secourir son aile gauche malmenée, cette charge, menée à bride abattue à l’image de celles qui avaient apporté la victoire à l’armée macédonienne dans les précédentes batailles, permet à Alexandre de se rapprocher du char de Darius, reconnaissable à son étendard impérial. Il n’en faut pas davantage pour que le monarque achéménide fasse faire demi-tour à ses chevaux et s’enfuie dans la plus totale confusion. Darius ne doit en effet sa sauvegarde qu’à la situation critique des troupes grecques dont la situation, au centre, nécessite qu’Alexandre revienne desserrer l’étau dans lequel son infanterie s’est retrouvée. Cette survie ne sera toutefois que de courte durée puisque Darius mourra assassiné dix mois plus tard.

Darius ne doit en effet sa sauvegarde qu’à la situation critique des troupes grecques dont la situation, au centre, nécessite qu’Alexandre revienne desserrer l’étau dans lequel son infanterie s’est retrouvée. Cette survie ne sera toutefois que de courte durée puisque Darius mourra assassiné dix mois plus tard.
Relief en ivoire représentant la bataille de Gaugamèles (fuite de Darius, détail). Travail du début du XVIIIe siècle. Coll. Museo Arqueológico Nacional, Madrid. Source : Wikimedia (cc)

Ce qu’il faut retenir

Cette victoire sans appel, doit autant au génie tactique d’Alexandre qu’à son audace et à son courage.

Lors de la bataille de Gaugamèles, Alexandre se révèle à nouveau comme un grand chef de guerre. Face au risque d’enveloppement auquel l’infériorité numérique de son armée l’expose, il décide cette imprévisible charge de cavalerie par laquelle il prend définitivement l’initiative sur ses adversaires acculés à réagir plus qu’à profiter de leur surnombre.

Mais Alexandre s’illustre aussi par sa manière de conduire ses troupes sur le champ de bataille.

Ainsi, pour saisir les opportunités comme celle qu’il exploite à la bataille de Gaugamèles, Alexandre se doit d’être au plus fort des combats, à l’endroit où se font les choix décisifs.

C’est aussi pourquoi, au mépris du danger que cela lui fait courir (et qui lui vaudra quelques blessures assez sérieuses), il s’efforce toujours d’être bien visible de ses troupes et porte à cet effet casque à cimier blanc et armure rutilante.

Nicolas L. — Promotion Marc Aurèle
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