« Restaurer le politique » : les interventions salutaires du colloque de l’Institut Iliade
Les combines de bas-étage qui se succèdent inlassablement lors des scrutins électoraux abîment la grandeur du Politique. En pleine campagne présidentielle, l’Institut Iliade lui a redonné ses lettres de noblesse.
En pleine année présidentielle, l’Institut Iliade organisait samedi 2 avril son IXème colloque sur le thème « Restaurer le Politique ». Un rassemblement à succès marqué par la hauteur de vue et la profondeur des interventions.
Les combines de bas-étage qui se succèdent inlassablement lors des scrutins électoraux abîment la grandeur du Politique. En pleine campagne présidentielle, l’Institut Iliade lui a redonné ses lettres de noblesse, devant un auditoire nombreux et attentif, dans l’enceinte de la prestigieuse Maison de la Chimie, au cœur du VIIe arrondissement de Paris.
Ce thème toujours plus actuel est introduit par Philippe Conrad, membre fondateur et président de l’Iliade. Il rappelle l’urgence de redéfinir l’essence du politique, à l’heure où la démocratie est menacée par une crise aiguë de confiance, où notre civilisation vit une entreprise de déconstruction sans précédent. C’est le rôle métapolitique de l’Institut Iliade. Travail qui s’ancre dans la durée et permet de mobiliser toutes les énergies disponibles : des générations d’hommes et de femmes formées intellectuellement pour constituer le creuset d’une nouvelle élite, pour le sursaut et le réveil de notre civilisation européenne. L’illusion de l’optimisme progressiste et la fin de l’histoire prônée par Francis Fukuyama a fait long feu. Ainsi, au-delà de la conjoncture des élections, restaurer le politique, c’est remettre en cause la primauté accordée à l’économie, c’est lui rendre sa liberté face au gouvernement des juges, c’est remettre en cause la figure de l’homo festivus (Philippe Murray), contrecarrer les entreprises de subversion intellectuelle dont le wokisme n’est qu’un aspect, et dépasser la contradiction entre peuple et élite.
Le jeune philosophe Ego non est donc intervenu sur les fondements du politique en revenant sur l’hypothèse de son autonomie. En effet, le politique ne peut se réduire ou se confondre avec la morale, à l’esthétique ou au juridique. Cette autonomie posée, il s’agit ensuite de définir les critères d’identification de ce qui est politique en s’appuyant particulièrement sur deux grands penseurs, Carl Schmitt et Julien Freund, et notamment les travaux effectués par le premier sur la distinction entre ami et ennemi. Agir politiquement, c’est accepter la possibilité du conflit, exercer l’autorité et manifester de la puissance. Restaurer le Politique est donc un défi. Une entreprise qui ne peut se faire correctement sans le retour du sacré, souligne Javier Portella. Ce dernier est enfoui et il faut qu’il rayonne de nouveau au grand jour afin d’embrasser avec joie l’ambivalence foncière qui marque notre sort en tant que peuple, en tant que communauté inscrite dans l’histoire.
Reconquête « cognitive »
Cela ne peut se faire en dehors du réel. Pour nous Européens, le géographe Olivier Eichenlaub démontre qu’il faut mener une politique de puissance, celle-ci étant inexistante dans l’Europe technocratique de Bruxelles. La renaissance doit s’appuyer sur un appareil politique renouvelé et débarrassé de la veulerie qui a conduit le continent à son lamentable état de « dormition ». Parallèlement, il est plus que temps d’entamer aussi une reconquête « cognitive » en se réappropriant ou en redécouvrant l’histoire, la géographie et les particularités de chaque peuple d’Europe.
Un impératif qui se couple à celui de lutter contre la davocratie qui transforme l’homme en machine, comme l’explique l’écrivain Renaud Camus. En effet, le système qui a besoin que l’individu devienne un simple consommateur est sous-tendu par deux exigences : une croissance démographique du nombre de ces derniers et l’interchangeabilité du produit consommateur « homme ». C’est donc logiquement qu’on procède au remplacement systématique des populations à faible taux de croissance (Européens). Ce remplacement n’est possible s’il est nié et dénié, que si l’on ne pose pas de différence fondamentale entre ce qui remplace et ce qui est remplacé. Interdire le mot race constitue donc la proclamation du dogme de l’inexistence des races. Ce négationnisme tient, entre autres inepties, par une répression idéologique organisée par un système aux ordres d’ « un gouvernement des juges » magistralement décrypté par le professeur Frédéric Rouvillois.
Engagement offensif, individuel et collectif
Nulle place au découragement. Le combat face à ces attaques répétées qui entrainent le déclin de la civilisation européenne, peut encore se mener. L’historien David Engels nous montre les actions individuelles et collectives, pour vivre avec ce déclin et œuvrer à un renouveau « hespérialiste » de la civilisation européenne. Ce renouveau ne sera pas permis par la démocratie mais par un engagement offensif, individuel et collectif, une nouvelle idéologie politique alliant conservatisme social et une lutte pour un patriotisme culturel paneuropéen. Une certaine idée de la souveraineté qui fait écho à la table ronde réunissant Alain de Benoist et Paul-Marie Couteaux. Les deux intellectuels s’accordent sur le fait que la privatisation de la politique est le principal ennemi. Privatisation de la politique largement démontrée par Pierre-Antoine Plaquevent, Ferenc Almassy et Michel Geoffroy lors d’une discussion éclairante sur l’hyperclasse mondiale. Ce phénomène majeur qui s’est produit en Occident à partir de la fin du XXe siècle est tout simplement la captation du pouvoir par les grandes entreprises mondialisées et les grandes institutions financières, principalement anglo-saxonnes, aux dépens des peuples et des Etats.
Cette déstabilisation profonde montre que nous sommes à la fin d’un cycle. Pour le professeur Michel Maffesoli, c’est l’ère des soulèvements. Une révolte du peuple dont Julien Rochedy rappelle prudemment qu’il ne faut pas l’idéaliser. Une discussion que vient parachever l’entretien donné par Laurent Obertone. Le journaliste insiste sur le fait que nous sommes aujourd’hui suspendus à ce jeu grotesque de la politique électorale et à cette élection qui a lieu tous les cinq ans. Comme si là résidait notre seul espoir, alors que nous devons à la politique actuelle notre situation désastreuse, l’immigration, l’insécurité, l’endettement, l’effondrement du capital social, etc. Il est temps d’en prendre conscience et de passer à autre chose, en commençant par un profond travail sur nous-mêmes. La reconquête commence dans les esprits, c’est là que se passe la sécession d’un État, d’un système, qui n’est pas là pour le bien des populations, mais pour leur asservissement.
Une reconquête des esprits qui se fera par une élite. Des chefs dont les qualités nécessaires ont été rappelées par Lionel Rondouin. Selon l’esprit classique de la philosophie politique romaine, il ne suffit pas d’avoir la potestas, le pouvoir hiérarchique ou constitutionnel de donner des ordres et le cas échéant de contraindre les subordonnés à obéir. Il y faut aussi l’auctoritas, une dimension psychologique du pouvoir, qui se garantit par une hauteur de vue reconnue, un prestige intellectuel et moral, une capacité à prendre des décisions en fonction d’un but à atteindre, du calme et de la pondération devant les épreuves de la vie et les imprévus de l’histoire. Bref, l’avant-garde des cadres de la renaissance française européenne, formée par des instituts ou des écoles de formation aux méthodes et vision du monde diverses comme l’IFP représentée par Alexandre Pesey ; l’ISSEP par Édouard Husson, GegenUni par Martin Sellner, et Fabrice Lesade pour l’Institut Iliade.
Enfin, ceux qui y ont participé le savent, le colloque de l’Institut Iliade est bien plus qu’une journée de conférences. C’est un rassemblement communautaire d’Européens qui se reconnaissent une affiliation culturelle et identitaire, des rencontres, des signatures d’écrivain, des échanges conviviaux avec des artisans enracinés, des éditeurs et des libraires. C’est aussi une communion esthétique, que ce soit par des expositions ou la réalisation de sublimes tentures originales, présentées sur scène, qui magnifient et donnent son expression artistique au thème choisi. Cette année, l’un des moments fort du colloque fut la représentation d’une scène de la magistrale pièce de théâtre Antigone de Jean Anouilh, remarquablement interprétée par Gérard Savoisien et Adeline Belloc.
Alix (Promotion Léonidas) et Adrien (Promotion Ernst Jünger)