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GAFA, Big Pharma… Qui gouverne le monde ?

Intervention de Michel Geoffroy, table ronde "GAFA, Big Pharma… Qui gouverne le monde ?", IXème colloque de l'Institut Iliade, samedi 2 avril 2022.

GAFA, Big Pharma… Qui gouverne le monde ?

Gouverner le monde ? Il ne faut pas se laisser impressionner par la propagande des mondialistes occidentaux : ils sont bien incapables de gouverner le monde et le monde ne se dirige pas vers son unification mais devient au contraire multipolaire.

Le projet de prendre la direction du monde a été forgé à la fin du XIXème siècle dans les pays anglo-saxons ; d’abord en Grande Bretagne autour de Lord Milner (la Table Ronde et le « commonwealth of nations ») puis aux États-Unis au prétexte de leur destinée manifeste et de l’excellence de leur système politique. Ce projet, élaboré au moment où les Européens dominaient le monde, recycle en partie la promesse biblique d’une soumission des royaumes à la nation élue, reprise par le puritanisme. Et avec la dissolution de l’URSS en 1991, les États-Unis, alors super puissance occidentale, ont cru être en mesure d’imposer leur gouvernance (nouvel ordre mondial) partout et de mettre fin à l’histoire à leur seul profit.

Mais ce projet a définitivement échoué au XXIème siècle. En réalité le monde est justement en train d’échapper aux mondialistes[1] occidentaux.

Le XXIème siècle se caractérise avant tout en effet par la fin de la domination occidentale sur le monde, comme l’avait très bien annoncé Samuel Huntington et qui pour cette raison fut diabolisé : un monde qui s’est « modernisé sans s’occidentaliser » comme il l’écrivait, c’est-à-dire qui accède à la puissance matérielle jusque-là détenue par les seuls occidentaux, mais sans pour autant adopter leur idéologie (leurs « valeurs » en novlangue) ni se soumettre à eux.

Et confrontée à l’immigration de masse, l’Europe domine d’autant moins le monde que c’est le monde entier qui s’installe au contraire sur sa terre et qui y impose ses mœurs, sa religion et ses guerres.

Que ce soit en Afghanistan, en Corée du Nord ou au Mali, à l’évidence les Occidentaux gouvernent de moins en moins le monde !

La véritable question n’est donc pas tant qui gouverne le monde mais bien qui gouverne le monde occidental.

La question est pertinente car si les mondialistes échouent à dominer le monde, ils ont bien le projet d’asseoir leur domination sur les peuples occidentaux. A moins que ces derniers ne se rebellent et reprennent leur destin en mains !

Où se trouve désormais le pouvoir dans le monde occidental ?

Les concepts génériques de Super Classe Mondiale[2] d’oligarchie, de Système, d’hyper classe, de Davocratie, d’État profond etc… qui se sont répandus dans le langage politique désignent un phénomène majeur qui s’est produit en Occident à partir de la fin du XXème siècle : la prise du pouvoir par les grandes entreprises mondialisées et les grandes institutions financières, principalement anglo-saxonnes, aux dépens des peuples et des États.

Il s’agit d’un phénomène avant tout occidental car ailleurs en Asie, en Chine ou en Russie par exemple, voire en Afrique, le politique continue de dicter ses choix aux acteurs économiques (comme certains oligarques l’ont appris à leurs dépens[3]). Ces pays sont donc diabolisés par les médias occidentaux, propriété du nouveau pouvoir économique transnational.

Cette prise de pouvoir marque l’aboutissement de la révolution des Lumières qui avait conduit à désencastrer l’économie de la société en promouvant l’individualisme méthodologique et en détruisant tous les corps intermédiaires, laissant l’individu seul face à l’État comme face au marché. La révolution libérale/libertaire initiée dans la seconde moitié du XXème siècle a achevé ce mouvement. Car la révolution libérale anglo-saxonne initiée dans les années 1980 (Reagan et Thatcher) a rendu les États incapables de résister au pouvoir économique, qui s’est déterritorialisé au surplus, avec la mondialisation économique et financière. Et elle a conduit à privatiser un nombre croissant de fonctions étatiques autrefois qualifiées de « souveraines ».

Cela se traduit par l’ascension d’un pouvoir économique et financier transnational désormais plus riche et plus puissant que bien des États occidentaux et par l’expansion de grands monopoles privés (comme par exemple les GAFAM censurant le président des États-Unis en 2020, la conquête spatiale hier enjeu de souveraineté au temps de la guerre froide, désormais privatisée etc…). Mais un pouvoir qui, à la différence de celui des États, n’est pas soumis aux obligations de continuité et de protection de la population, bien au contraire, ni à celles de la responsabilité politique.

En Occident le nouveau pouvoir économique mondialisé se renforce constamment car il socialise les pertes et les effets pervers (payés par les États et les peuples : exemples avec l’immigration, les délocalisations ou la crise bancaire de 2008) et privatise les bénéfices (prenons l’exemple des contrats léonins passés entre l’UE et Big Pharma prévoyant que les effets secondaires des « vaccins » ne pourront être mis à charge des labos). Pour cette raison, les États, croulant sous les dettes, s’appauvrissent pendant que les grandes entreprises mondialisées s’enrichissent ; la richesse devient de plus en plus transnationale et la pauvreté, cantonnée dans l’espace national.

Symbolique de ce transfert de pouvoir, de plus en plus de grandes entreprises deviennent politiquement militantes et prescripteurs idéologiques (chartes des valeurs, censure ou exclusion des dissidents, caractère idéologique de la publicité), comme le montrent au premier chef les GAFAM. C’est ce qu’on appelle le capitalisme woke ou la responsabilité sociale de l’entreprise (RSE) : la grande entreprise devient militante du progressisme. D’autant que derrière la plupart des commandements du progressisme sociétal on trouve des intérêts marchands bien précis : comme les grandes entreprises (favorables à l’immigration), les femmes CSP+ (qui militent pour la féminisation des emplois de direction), les lobbies de l’éolien, du tout électrique (écologie punitive), du tout numérique (GAFA), de la viande industrielle (végans), ou Big pharma (PMA/GPA, transsexualisme, vaccination) etc….

Cette prise du pouvoir s’inscrit en outre dans un nouvel ordre économique : celui des « hommes en trop », des hommes « remplaçables ».

Un nouvel ordre économique qui ambitionne de se passer des hommes en Occident, des producteurs comme des consommateurs : les délocalisations, l’immigration et l’intelligence artificielle sont à même de pourvoir à tous les besoins de la nouvelle économie monde.

Ce nouvel ordre économique provoque le grand déclassement occidental (ex travail le dimanche, CDI devient l’exception, petits boulots, working poors, chômage structurel dû à l’excès de main-d’œuvre – puisque l’emploi se raréfie – permettant un chantage permanent à la « modération salariale », individualisation du contrat de travail, marginalisation des syndicats et de l’action collective ; travail à la maison, déclin des classes moyennes etc…).

D’autant que l’effondrement du communisme en Occident a aussi supprimé la menace que le socialisme faisait peser sur le capitalisme depuis le XIXème siècle.

Il s’agit d’une régression historique essentielle qui ne passe pas inaperçue aux yeux de la population autochtone et qui explique, avec le rejet de l’immigration de masse, la défiance croissante des peuples autochtones vis-à-vis du Système [4] en Occident.

Même si l’oligarchie s’efforce de le cacher par l’écologie punitive qui est l’idéologie destinée à justifier (verdir) la régression culturelle, économique et sociale de l’homme européen (et à créer de nouveaux et fructueux marchés : ex l’éolien). C’est pourquoi une alliance durable entre l’écologie militante et le nouveau capitalisme mondialisé s’est nouée au XXIème siècle, comme le montre bien l’essai de Klaus Schwab sur Le Grand Reset.

Alors comment se gouverne le monde occidental ?

Aujourd’hui les catégories classiques de la science politique n’ont plus court en Occident : les principes d’équilibre et de séparation des pouvoirs, de souveraineté populaire, de responsabilité politique, de suprématie de la loi ne rendent plus compte de la réalité. Et les contre-pouvoirs disparaissent progressivement.

Car l’autorité est désormais avant tout économique, financière, technologique et judiciaire et de moins en moins politique, législative et démocratique, donc elle est de moins en moins limitée (No limits est le mot d’ordre de la super classe mondiale [5]!). Le terme de gouvernance, hérité de la gestion d’entreprise anglo-saxonne tend ainsi de plus en plus à se substituer à la notion de gouvernement et bien sûr aussi de souveraineté.

Le véritable pouvoir s’organise désormais autour de 4 cercles concentriques et imbriqués : le cercle des dirigeants du pouvoir économique et financier qui détient la richesse donc le principal levier d’action en Occident, le cercle médiatique et des intellectuels organiques, le cercle associatif et des ONG (celui de la « société civile » en novlangue), le cercle des organismes publics (simple puissance exécutive du premier cercle).

On peut aussi prendre l’image des poupées russes pour décrire cette imbrication !

Ce pouvoir repose sur la mobilisation de trois leviers principaux :

  • l’argent qui permet désormais de tout acheter en Occident y compris le personnel politique (il faut de l’argent pour se faire élire).
    La post-démocratie instaure une interférence permanente entre pouvoir politique et pouvoir économique avec une quasi interchangeabilité des responsables (cf le rôle des banques comme pépinière des politiques européens : de Goldman Sachs à la Banque Rothschild, illustration du renversement du modèle trifonctionnel européen). Les conflits d’intérêts sont désormais permanents entre les « décideurs » et le système économique (ex Big Pharma).
  • les médias, devenus la propriété des puissances d’argent[6], car le nouveau système repose sur une propagande permanente. Ce sont comme dit Renaud Camus les « amis du désastre » : ceux qui ont pour fonction de cacher notre déclin ou notre servitude sous des couleurs plaisantes.
  • le gouvernement des juges, qui sont les chiens de garde de l’idéologie de la super classe mondiale et qui servent à museler les législateurs et à réprimer les dissidents, au nom de l’État de droit expression novlangue désignant le projet de marginaliser tout principe électif et toute souveraineté politique.

Le vrai pouvoir parait invisible car il a de multiples têtes ; c’est la réincarnation du thème de l’hydre grecque ! Ce pouvoir est difficile à désigner donc à atteindre, alors que jusqu’alors le pouvoir politique s’incarnait dans une entité unique, identifiable et localisée : un souverain, un président, un chef de parti, un parti.

Il paraît invisible, mais il existe bien (« il n’y a pas de chef d’orchestre » mais néanmoin… ils jouent tous la même partition !). Il a bien un centre, qui se situe dans les pays anglo-saxons, là où se situent les plus puissantes banques et entreprises « mondiales ». En outre ce pouvoir ne cache pas ses projets : il suffit de lire les conclusions du Forum de Davos, ou les déclarations de ses intellectuels organiques pour les connaître.

Mais ce pouvoir agit dans la collégialité (qui invisibilise et déresponsabilise), la discrétion (le pouvoir médiatique le met peu en lumière) et l’influence : citons les exemples que sont Davos et les conférences internationales, la commission européenne, les ONG de l’Open Society[7], les clubs d’influence (Le Siècle, la commission trilatérale, le groupe de Bilderberg etc…).

Le vrai pouvoir sort donc de la sphère politique, progressivement réduite à un spectacle en Occident.

Dans le nouvel ordre économique qui s’installe, les Etats et les gouvernements nationaux ne disparaissent pas mais ils changent de fonction : ils ont désormais pour rôle d’adapter, de gré ou de force, les peuples aux exigences de la nouvelle économie monde : de les rendre plus liquides, au sens de Zygmunt Bauman. Ils doivent imposer à la population ce que souhaite le pouvoir économique et financier transnational (ex imposer ce que veut la « troïka » à la Grèce, imposer l’immigration, imposer le tout vaccinal etc…).

C’est pourquoi aujourd’hui le gaz lacrymogène et l’état d’urgence deviennent le symbole du système politique occidental !

La nouvelle économie mondialisée a en effet besoin de rendre l’homme occidental simple locataire de son destin et de ses moyens d’existence (et non plus propriétaire de soi-même) ; d’où par exemple la volonté de pénaliser la richesse immobilière par rapport à la richesse mobilière qui est plus liquide.

D’où également les réflexions actuelles autour du thème du revenu citoyen ou du revenu universel donc octroyé et non plus gagné.

Au plan idéologique ce nouveau paradigme s’incarne, chez ceux qui en profitent, dans la thématique de la société ouverte – inventée par Karl Popper – et de la non- discrimination, c’est-à-dire de la liquidation – ou liquéfaction – programmée de tous les obstacles à la libre circulation des flux (physiques, financiers et humains), la création d’un monde hors sol (voire virtuel comme le Métavers) censé apporter le paradis terrestre (« Je ne suis qu’un banquier faisant le travail de Dieu » Lloyd Blankfein, président de Goldman Sachs de 2006 à 2018).

C’est pourquoi aussi l’idéologie de la déconstruction (des sociétés occidentales) est portée par la super classe mondiale, qui a besoin de promouvoir une nouvelle table- rase pour asseoir son pouvoir et de délégitimer tout ce qui peut lui être opposé. Notamment la mise en accusation de toute normalité civilisationnelle et de toute identité en Occident (wokisme ). Cette idéologie permet aussi de créer des oppositions artificielles « horizontales » (ex hommes contre femmes, blancs contre noirs) de façon à effacer l’opposition « verticale » entre bénéficiaires et victimes de la mondialisation.

Le contrôle de la population remplace donc progressivement la souveraineté des peuples en Occident. Le contrôle économique, le contrôle judiciaire, le contrôle idéologique et le contrôle technique. Pour cette raison les élections servent de plus en plus difficilement à établir une véritable alternance politique en Occident. Les progrès techniques permettent en effet d’avancer vers un contrôle en temps réel de la population

Le nouveau capitalisme mondialisé est d’ailleurs aussi un capitalisme de la surveillance[8] (ou de l’obéissance) qui repose sur la mobilisation de l’information personnelle résultant du tout numérique.

Ce capitalisme de la surveillance permet de réaliser sous nos yeux, le Panopticon imaginé par le libéral Jeremy Bentham (un dispositif spatial de surveillance de la population). La mobilisation de l’information personnelle sert dans un premier temps au commerce mais elle peut être utilisée à des fins de contrôle social. Elle se présente aussi sous les traits d’une facilitation de la vie, ce qui fait que les victimes sont conduites à aimer les instruments de leur future servitude.

La digitalisation de la vie (identité numérique, portefeuille électronique que veut promouvoir la BCE, fin de la monnaie fiduciaire c’est-à-dire de la « liberté frappée ») doit servir à mettre en place une société du contrôle[9] durable : cette digitalisation étant évidemment présentée comme plus écologique !

La pandémie de covid a d’ailleurs permis d’engager le passage au crédit social en Occident où la liberté devient l’exception et le biopouvoir ainsi que l’état d’urgence, la règle[10]. On a aussi expérimenté la désignation d’une partie de la population à la vindicte publique et instillé l’idée que l’accès aux soins pourrait être réservé à ceux qui adoptent le bon comportement.

En conclusion l’Occident vit maintenant sous un système oligarchique, car le nouveau modèle économique mondialisé se détache de la démocratie.

La parenthèse ouverte par les Lumières – où le libéralisme économique et le marché avançaient de pair avec le libéralisme politique -se referme pour cette raison au XXIème siècle[11].

La post-démocratie oligarchique instaure une séparation radicale entre ceux qui dirigent vraiment – et qui se prétendent « éclairés » ou « progressistes » pour ce faire – et ceux qui sont gouvernés.

La séparation et l’isolement caractérisent le pouvoir oligarchique en Occident : l’oligarchie vit de plus en plus séparée et cachée du reste de la population, avec laquelle elle évite tout contact, notamment en raison de sa capacité à se délocaliser en permanence et à vivre dans des milieux préservés grâce à sa richesse. Elle prône la transparence mais pas pour elle !

Ce n’est sans doute pas anodin si un certain nombre de milliardaires américains se lancent aujourd’hui dans la conquête spatiale : ne rêvent-ils pas de réaliser l’anticipation du film Elysium[12], où l’oligarchie s’est réfugiée dans une station spatiale paradisiaque, pendant que le reste de la population s’entasse sur une terre polluée et surpeuplée ?

Mais cette oligarchie n’est pas une aristocratie car elle ne risque rien pour elle-même puisqu’elle a organisé son irresponsabilité et son impunité juridique en Occident. C’est bien pourquoi la population ne l’aime pas et que l’on assiste en Occident à une révolte latente des peuples autochtones.

Michel Geoffroy

Notes

[1] Voir Michel Geoffroy « La Nouvelle Guerre des Mondes », Via Romana, 2020.
[2] Michel Geoffroy « La Super Classe Mondiale contre les Peuples », Via Romana, 2018.
[3] Pensons par exemple à la chute de Carlos Ghosn initiée par un procureur japonais.
[4] 73% des personnes interrogées en France estiment que “l’économie actuelle profite aux patrons aux dépens de ceux qui travaillent” (Étude Opinionway pour Le Figaro réalisée du 23 décembre 2021 au 10 janvier 2022).
[5] Cf. une publicité des automobiles Audi : « Nous sommes capables de tout » !
[6] Ce qui n’empêche pas les médias mainstream d’être largement financés par le contribuable en France.
[7] L’ECLJ a révélé qu’une part importante des juges de la CEDH avaient des liens avec les ONG de l’Open Society, comme certains experts de l’ONU.
[8] Shoshana Zuboff « L’âge du capitalisme de surveillance » Zulma éditions 2020.
[9] Emmanuel Macron évoque lui la « société de vigilance qu’il nous revient de bâtir » en octobre 2019.
[10] Cf. le rapport du Sénat sur les outils numériques au service de la lutte contre la pandémie de juin 2021: l’objectif est de faire pour la santé « ce que l’on a fait pour la sécurité routière » : amendes automatiques, traçage . Système auquel poussent les assureurs car il permettrait de faire payer plus cher ceux qui « prennent des risques ».
[11] Michel Geoffroy « Le Crépuscule des Lumières », Via Romana, 2021.
[12] Film du sud-africain Neill Blomkamp sorti en 2013.