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Bourdelle, la terre et le feu

Bourdelle, la terre et le feu

En ces premiers jours croissants fêtons le Soleil-Enfant par un hommage au sculpteur de l’énergie et des forces archétypales : Antoine Bourdelle. Ami et collaborateur de Rodin, il poursuit la quête tellurique du maître au-delà du mouvement-passion et de la vie-sensualité vers les puissances primordiales, les archétypes, les formes primitives dont la chair est parfois l’habit.

Ses dieux, ses allégories trouvent leurs échos dans les cavernes de nos entrailles, leurs reflets dans le lac noir de notre mémoire ancestrale. Il n’est alors pas question de joliesse des courbes et de velouté du grain : sous l’olympien affleure le titan. L’énergie ruisselle de ces muscles tendus, de ces corps puissants qui ne sont que terre et feu et, quand parfois souffle le vent, c’est celui des tempêtes et des épopées, jamais la brise anacréontique.

Bourdelle ne ferait-il donc droit qu’au virilisme agressif ou hiératique, que ce soit chez des figures masculines ou féminines ? Au contraire : la volupté du matin fait face à la mélancolie du soir sans mignardise affectée mais avec une force sensuelle. Pénélope est plus que jamais la femme-pilier, presque menhir, puissamment chthonienne malgré la tristesse songeuse de sa pose. La jeunesse aux fruits d’or et à la sinuosité serpentine allie elle aussi, dans sa féminité, flamme (la jeunesse, la vie, le fruit) et glèbe (les courbes reptiles).

Ses dieux, ses allégories trouvent leurs échos dans les cavernes de nos entrailles...

Face à la puissance surhumaine, aux forces brutes et pures matérialisées dans la glaise et le bronze, Bourdelle représente ses frères humains, ses précurseurs, ses amis, avec une tendre douceur. Les nuances des émotions, la finesse des traits souvent saturniens, comme conscients _ tragiques roseaux _ de leur finitude, s’opposent à l’absolu des idées allégoriques et témoignent de la complète maîtrise de l’artiste.

Pour les parisiens, nul meilleur lieu pour découvrir son œuvre qu’à Montparnasse, en son atelier musée aux mille recoins dont les cours et jardins permettent soit d’étudier, carnet de croquis à la main, les jeux de la lumière sur les bronzes, soit de se laisser enthousiasmer au sens étymologique assis sur quelque banc sous le soleil.

La collection picturale mérite également attention, qu’il s’agisse des œuvres de Bourdelle même ou de celles qu’il collectionnait. Le style sombre, symboliste et tourmenté y domine pour le plus grand plaisir des âmes intranquilles.

Source : flambergeetbelladone.wordpress.com