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Les pionniers de la photographie

Nicéphore Nièpce, Louis Daguerre et William Talbot font partie de cette génération de pionniers dont l’œuvre a permis d’inscrire la photographie au panthéon des arts.

Les pionniers de la photographie

« J’ai trouvé le moyen de fixer les images de la chambre obscure ! — J’ai saisi la lumière au passage et je l’ai enchaînée ! — J’ai forcé le soleil à me peindre des tableaux ! »

Cette citation de Louis Daguerre montre que même si les importantes découvertes réalisées dans les domaines de la chimie et de l’optique au XVIIIe siècle permettent de donner naissance à la photographie, celle-ci- n’aurait jamais vu le jour sans l’ingéniosité et la persévérance d’inventeurs européens désireux de marquer l’histoire des sciences et des arts d’une empreinte indélébile.

Une invention aux multiples inventeurs

Granuleuse et sombre, cette image tout juste lisible est la toute première épreuve recensée dans l’histoire de la photographie. On en doit la paternité à Joseph Nicéphore Nièpce, qui l’a réalisée vers 1826 – 1827. Afin de parvenir à ce résultat, il utilise une « boîte » noire portative et s’inspire de techniques de lithographie en remplaçant les sels d’argent par du bitume de Judée. Appliqué sur une plaque de cuivre, ce dernier sert de vernis destiné à protéger l’image tout en durcissant au soleil. Après avoir posé sa chambre noire portative face à la lumière, il ne lui reste plus qu’à patienter. Huit longues heures sont nécessaires afin d’obtenir cette image, véritable doyenne de la photographie. Celle-ci immortalise l’arrière de la maison familiale appartenant à Nicéphore Nièpce, située à Saint-Loup de Varenne.

Joseph Nicéphore Nièpce, Point de vue du Gras, 1826 – 1827
Joseph Nicéphore Nièpce, Point de vue du Gras, vers 1826-1827.

Il baptise ce tout premier procédé photographique l’héliographie, qui signifie littéralement « dessiner avec le soleil »… L’inventeur de cette technique meurt en 1833, avant que l’héliographie ne soit connue du grand public. Sa rencontre avec Louis Daguerre en 1829 permet néanmoins à cette invention de prendre un nouveau tournant.

En effet, cet inventeur créée quelques années plus tard un procédé popularisé à partir de 1839 : le daguerréotype. La technique consiste à placer dans une chambre noire une plaque de cuivre argentée exposée à des vapeurs d’iode dotées de propriétés photosensibles. Une fois que cette plaque est suffisamment exposée à la lumière, la plaque est soumise à des vapeurs de mercure puis soigneusement lavée par traitement chimique. L’image obtenue est bien plus précise qu’avec l’héliographie mais il est impossible d’obtenir plusieurs exemplaires : chaque image obtenue est unique.

Louis Daguerre, Boulevard du Temple, Paris, vers 1838, daguerréotype, 15 x 18,5 cm
Louis Daguerre, Boulevard du Temple, Paris, vers 1838.

Après quelques résultats satisfaisants réalisés à partir d’objets disposés selon la tradition picturale des natures mortes, Daguerre tente de capturer des images architecturales en plaçant son dispositif à l’une des fenêtres de son appartement situé au 5 rue des marais, à Paris. Il obtient ainsi l’image visible ci-dessus, après plusieurs heures d’exposition. Il s’agit en outre de la toute première photographie où figure un être humain. Il est impossible pour les tous premiers équipements de prendre des images de gens en mouvement car le temps de pose est encore trop long. Passants et attelages pressés ne peuvent être capturés. Toutefois, si l’on observe attentivement ce cliché, on remarque la présence en bas à gauche de l’image la silhouette d’un homme debout, penché en avant, en train de se faire cirer les bottes. Il semblerait qu’il soit resté assez longtemps immobile, par soucis de coquetterie, afin d’entrer dans l’histoire de la photographie.

Doté d’un solide sens des affaires, Louis Daguerre fait connaître et commercialiser ce nouveau procédé en s’appuyant notamment sur un précieux soutien politique : François Arago. Ce dernier présente l’invention de la photographie devant l’Académie des sciences et des beaux-arts en janvier 1839, signant ainsi l’entrée officielle de cet art dans l’Histoire. Daguerre va également être rémunéré par le gouvernement français afin d’ouvrir à tous l’utilisation du daguerréotype, à l’inverse de l’Anglais William Talbot (1800 – 1877).

William Henry Fox Talbot, La Meule de foin, 1844, calotype, 16 x 21 cm
William Henry Fox Talbot, La Meule de foin, 1844.

Inventé en 1841, le calotype (ou Talbotype) vient des mots grecs kalos (beau) et typos (impression). Ce procédé photographique constitue un jalon majeur dans l’histoire de la photographie, car Talbot a l’idée d’utiliser du papier épais comme support et non plus des plaques de cuivre. L’action du nitrate d’argent combiné notamment à l’iodure de potassium permet de réduire considérablement les temps de pose en ne durant que quelques minutes après avoir été placés sur un châssis et exposés à la lumière. On obtient une image inversée par rapport à la réalité, c’est-à-dire « négative ». En apposant le négatif obtenu à du papier salé, une image positive apparaît. Par conséquent, le calotype présente un avantage important par rapport au daguerréotype : il est possible de développer autant d’épreuves positives que l’on veut, à l’inverse du procédé de Daguerre, qui ne propose qu’une image positive unique. Néanmoins, les tirages obtenus en utilisant la technique inventée par Talbot sont certes plus économique en utilisant du papier, mais ces photographies sont légèrement moins claires, avec des contrastes entre ombre et lumière moins marqués. L’inventeur Anglais décide de faire breveter sa création, la rendant ainsi moins accessible au grand public que le daguerréotype. En juin 1844, il publie tout de même le premier livre illustré de photographies, intitulé The Pencil of Nature. Dans cet ouvrage se trouve notamment La Meule de foin, visible ci-dessus. Talbot a à cœur de présenter des images au caractère réaliste, authentique, car pour lui la photographie permettrait « d’enrichir nos images d’une multitude de détails minutieux ». Force est de constater que cet objectif est atteint lorsqu’on observe cette meule de foin mettant en relief le couteau planté dedans, les feuilles en arrière-plan ainsi que l’ombre projetée par l’échelle accolée à la meule.

En définitive, l’œuvre léguée par ces trois précurseurs marque le début de l’histoire de la photographie et va inciter d’autres pionniers à se lancer dans cet art si novateur.

Anne-Sophie – Promotion Léonidas

Bibliographie

  • Ian Haydn-Smith, Petite histoire de la Photo, éditions Flammarion, Paris, 2018
  • Juliet Hacking (sd), Tout sur la Photo, éditions Flammarion, Paris, 2012
  • Le site internet dédié au musée Nicéphore Nièpce expose le travail de cet inventeur, la reconstitution de son atelier et les recherches de Louis Daguerre.