Institut ILIADE
Institut Iliade

Pour une révolution européenne !

Mariée et mère de trois enfants, Marion du Faouët est professeur de français depuis une dizaine d’années et étudie les romans arthuriens tardifs du XIIIe siècle. Auditrice de la promotion Dante, elle est, depuis, devenue cadre de l’Institut.

Pour une révolution européenne !

Notre destin d’Européens n’est pas de rester en marge de la société. L’Institut Iliade nous invite à la recherche de l’excellence, à mobiliser chaque fibre de notre être pour sortir de notre « pré carré », pour devenir proprement des révolutionnaires. Mais la révolution que nous appelons de nos vœux n’a rien de commun avec les révoltes sanglantes qui ont émaillé l’histoire des nations européennes au cours des derniers siècles. Cette révolution sera, au contraire de la table rase que représentaient celles qui ont émaillé l’histoire de l’Europe, un retour aux racines de notre identité.

« Et voilà qu’ils pleuraient de joie en caressant leurs sabres ! Leurs armes oubliées, rouillées, avilies, mais qui leur apparurent comme une virilité perdue, car seules elles permettent à l’homme de créer le monde. Et ce fut le signal de la rébellion, laquelle fut belle comme un incendie !
Et tous, ils moururent en hommes ! »
Antoine de Saint-Exupéry
Citadelle
, éditions Gallimard, 1948

Ce nouveau colloque de l’Institut Iliade fut, pour reprendre les mots d’Henri Vincenot, « une de ces journées singulières » qui ont pu nous donner « la sensation d’appartenir vraiment à une caste à part, une espèce de communauté qui, à bien y regarder, [vit] en marge, absolument et voluptueusement séparée et au sein de laquelle il ne [peut] se passer que des choses prodigieuses[i] ».

Mais notre destin d’Européens n’est pas de rester en marge de la société. L’Institut Iliade nous invite à la recherche de l’excellence, à mobiliser chaque fibre de notre être pour sortir de notre « pré carré », pour devenir proprement des révolutionnaires. La révolution que nous appelons de nos vœux n’a rien de commun avec les révoltes sanglantes qui ont émaillé l’histoire des nations européennes au cours des derniers siècles. Du XVIIIe à aujourd’hui, ces révolutions animées par une haine presque fanatique ont prétendu faire table rase de notre passé, et consumer les fondements même de notre civilisation en exposant les peuples européens au « soleil noir » mortifère de leur modernisme déréglé.

La révolution ne doit pas être pensée comme une rupture avec le monde d’avant. L’étymologie cosmologique du mot nous dit bien ce qu’elle doit être : revolvere en latin signifie retourner à son point d’origine. Jusqu’au XVIIIe où le terme prend un sens politique, il désignait un mouvement circulaire, une évolution qui revient, un éternel retour : le printemps et ses bourgeons naissants sont donc une révolution en soi, de même que les astres qui guident les marins en haute mer.

Le philosophe anglais Chesterton nous le dit :

« L’homme révolté moderne ne sert pratiquement plus l’objet de sa révolte. En se rebellant contre tout, il a perdu le droit de se rebeller contre quoi que ce soit[ii]. »

Mais chacun d’entre nous, ici, a su regagner ou conserver ce droit à se rebeller. Ainsi la révolution européenne à laquelle nous sommes tous appelés à participer, si elle est bien évidemment une réaction à un ordre établi fait d’individualisme, de laideur et de volonté d’homogénéisation constante, doit avant tout nous placer entre le futur et le passé, nous faire reprendre conscience de notre rôle de passeurs de la longue tradition européenne. Il ne s’agit pas de retourner en arrière, dans un passé devenu peu à peu légendaire et muséifié, afin d’y planter nos tentes, mais bien de plonger dans les trésors de notre longue mémoire, de nous nourrir de ses riches enseignements afin d’y trouver l’immanence de l’homme européen.

« Car le passé, nous dit Hélie de Saint Marc, éclaire le présent qui tient en lui-même l’essentiel de l’avenir. […] il n’y a pas d’acte isolé, de destin isolé. Tout se tient. Il faut croire à la force du passé, au poids des morts, au sang et à la mémoire des hommes ; que serait un homme sans mémoire, il marcherait dans la nuit ; que serait un peuple sans mémoire, il n’aurait pas d’avenir, et les hommes de l’avenir, ceux qui forgeront l’avenir seront ceux qui auront la plus vaste mémoire[iii]. »

Cette révolution européenne ne se fera donc pas par effacement de notre passé commun, elle sera provoquée par une action collective d’un peuple qui aura su renouer avec sa grande histoire et recréer une véritable solidarité entre les peuples européens.

Ne nous leurrons pas, pour qu’une révolution européenne soit possible, c’est avant tout parce qu’un type d’homme aura été capable de la mener. L’Institut Iliade contribue justement à former ces futurs rebelles à qui il fournit depuis déjà dix ans des cartouches métapolitiques et culturelles.

Permettez-moi de mettre en avant trois armes essentielles pour lutter efficacement contre les dérives les plus délétères de la modernité : humilité, radicalité et communauté.

On présente trop facilement l’humilité comme une vertu spécifiquement chrétienne, pourtant elle trouve déjà son expression dans l’antique vertu païenne qui consiste à tenir son rang. De même que chez les Antiques on pratiquait l’ascèse comme préparation physique avant une lutte, l’humilité doit être une préparation mentale et spirituelle avant le combat civilisationnel à mener. Humilité face à ceux qui nous ont précédés dans la lutte : les exemples sont légion, d’hommes qui ont combattu pour la grandeur de l’Europe ; humilité face à nos propres capacités : il ne s’agit pas là de revêtir la bure, mais d’accepter de mettre toutes nos capacités au service d’une cause qui nous dépasse ; humilité face au combat : on ne part pas la fleur au fusil combattre une hydre féroce. Pour mener à bien toute révolution intérieure, il faut donc accepter sa place dans l’ordre du monde et dans sa communauté et, bien sûr, y déployer tous ses talents. Une révolution européenne ne sera possible que parce que nous aurons eu l’humilité d’accepter cette place qui nous est due et qui nous oblige, sans jamais faillir aux normes que nous nous serons fixées.

La révolution telle que nous la concevons implique aussi une radicalité absolue. Être radical, tout d’abord, signifie revenir à la racine des maux qui pervertissent notre peuple : culpabilisation permanente, « grand effacement » de la longue mémoire, ferment de notre identité européenne, volonté de faire de nous des êtres liquides, sans colonne vertébrale, sans le moindre idéal, ou, pour reprendre les mots de Renaud Camus, une MHI : matière humaine indifférenciée, tout juste bonne à s’abêtir devant des programmes télévisuels. Être radical, c’est non seulement tirer ce fil pervers qui cherche à nous annihiler, c’est aussi en refuser la fatalité. Les derniers hommes libres, pour paraphraser Erik L’Homme, se trouvent « aujourd’hui dans les marges[iv] ».

Ils ont su faire un choix radical, qui engage tout leur être. Car être radical signifie aussi retrouver ses racines. Les nôtres s’appellent Ulysse, Roland ou encore Arthur, elles ont fait se dresser des temples païens et des cathédrales gothiques, elles ont épousé le rythme des saisons de notre vieux continent en les chantant et les dansant, elles sont sagesse et mémoire et nous enseignent l’âpre combat de l’homme domestiquant le monde. Être radical, c’est être fidèle, radicalement fidèle à la jeunesse de notre tradition qui renaît à chaque génération.

Mais cette révolution européenne ne pourra se faire sans une communauté solidaire. C’est, selon les mots de Dominique Venner : « La lance [faisant] un rempart à la lance, le bouclier au bouclier, chacun étayant l’autre ; l’écu [s’appuyant] sur l’écu, le casque sur le casque, le guerrier sur le guerrier[v] », que nous irons combattre. Dans le domaine intellectuel, culturel, ou encore économique, les Européens doivent refonder des communautés solides, organiques, enracinées. Par-delà les frontières, le peuple européen doit recréer de véritables solidarités, former un empire de communautés. Comme le dit Michel Maffesoli, « la modernité, c’est l’individualisme, la postmodernité, c’est la communauté ».

Ces communautés d’Européens capables d’une telle révolution, Bernard Lugan les décrivait déjà en 2014 :

« Quand l’autorité s’est délitée, quand les repères sont perdus, quand le plus grand nombre désespère, quand certains se laissent aller à des sentiments morbides en voyant dans la défaite une pénitence divine, alors, se lèvent de petits groupes sachant ce qu’ils sont, d’où ils viennent, où ils vont et ce qu’ils veulent. […] Ils sont les Rebelles[vi]. »

Alors, chers amis, soyons dès aujourd’hui des Rebelles ! L’Europe, terre de nos pères, sera la terre de nos enfants si nous parvenons à tenir notre rang : être des passeurs de mémoire, conscients de la nécessité de notre rôle de sentinelles veillant à la fois sur les braises de notre passé, sur les remparts de nos citadelles et sur cette nouvelle génération qui se lève, fière et audacieuse, prête à défendre notre civilisation, et qui, refusant la laideur et les facilités d’une vie artificielle, s’engagera à son tour dans la voie étroite de la révolution, par fidélité à ce qu’elle est : une Europe debout !

Marion du Faouët

Notes

[i] Henri Vincenot, Rempart de la Miséricorde, éditions Anne Carrière, 1998.
[ii] Gilbert Keith C hesterton, Orthodoxie, 1908, trad. Lucien d’Azay, éditions Flammarion, coll. « Climats », 2010.
[iii] HélieDenoix de Saint Marc, Allocution lors de la remise de ses insignes de grand officier dans l’ordre de la Légion d’honneur, fort de Nogent, 29 mars 2003.
[iv] Erik L’Homme, Des pas dans la neige – Aventures au Pakistan, éditions Gallimard Jeunesse, coll. « Pôle fiction », 2010.
[v] Dominique Venner, Un samouraï d’Occident – Le Bréviaire des insoumis, éditions Pierre-Guillaume de Roux, 2013.
[vi] Bernard Lugan, à propos des « Rebelles » du Salon du livre d’histoire de Blois : éloge de Dominique Venner, 9 octobre 2014.