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Ça tombe comme à Gravelotte

« C’est un trou de verdure où chante une rivière
Accrochant follement aux herbes des haillons
D’argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c’est un petit val qui mousse de rayons »
Le Dormeur du val, Arthur Rimbaud (1854-1891)

Le mont Beuvray, une montagne occupée par un oppidum gaulois et recouverte par une forêt
Ça tombe comme à Gravelotte

Récemment encore, l’expression « ça tombe comme à Gravelotte » était utilisée pour évoquer une pluie abondante, pour qualifier une succession de catastrophes ou encore une répétition. Mais ce sont surtout les hommes qui sont tombés à Gravelotte et autour de Metz. À Gravelotte, le 16 août 1870, on a pu dénombrer près de 32 000 morts, blessés ou disparus, français et allemands. Les trois jours de combats des 14, 16 et 18 août 1870 ont fait plus de 75 000 morts, blessés ou disparus. L’ampleur des pertes et la violence des combats marquèrent les esprits. Il faudra attendre la Première Guerre mondiale, incomparablement plus meurtrière, pour atténuer le souvenir de la guerre de 70.

Thématique générale du parcours : Découverte pédestre du lieu de la bataille de Gravelotte.
Région : Lorraine.
Pays : France.
Mode de déplacement : À pied.
Durée du parcours : Prévoir une bonne demi-journée avec la visite du musée.
Difficulté du parcours : Aucune, c’est une zone sans difficulté, accessible à tous.
Période possible : Toute l’année. Prévoir en automne et en hiver des chaussures de marche car le terrain est très boueux.

Présentation géographique

Gravelotte se situe sur le plateau messin, dans l’axe Metz-Verdun, à une quinzaine de kilomètres de Metz. La commune fait partie du parc naturel régional de Lorraine.

Cadre historique et culturel

Pendant la guerre franco-prussienne de 1870-1871, au cours du mois d’août, le village de Gravelotte ainsi que ses environs ont vu se dérouler l’une des batailles les plus meurtrières de la guerre. La bataille oppose deux corps d’armée prussiens dirigés par le général von Steinmetz, à deux corps d’armée français commandés par le maréchal Bazaine. Avant la bataille, les Prussiens occupent déjà Gravelotte et le versant ouest du ravin de la Mance, ruisseau traversant le champ de bataille. Les Français occupent le côté est, au niveau du village de Rozérieulles. Le 17 août, alors que l’armée de Steinmetz est en mouvement, les Français en profitent pour fortifier les positions occupées ainsi que les fermes voisines du Point du Jour, de Saint-Hubert et de Moscou qui deviennent des points d’appuis stratégiques pour la défense française.

Ces fermes, disputées âprement par l’ennemi, résistent vaillamment et ne sont prises par les Prussiens qu’au prix d’énormes pertes. Ces combats ont démontré l’ardeur et la combativité des troupiers français qui ont fait l’estime de leurs adversaires. Ils ont résisté sans reculer en infligeant des pertes sévères aux Prussiens. Seule la nuit vint mettre fin au carnage. Malgré sa supériorité relative, l’armée française choisit, faute d’agressivité suffisante, de sonner la retraite pour se réfugier dans Metz qui fut prise le 27 octobre 1870.

Profondément marqué par cette bataille, qu’il surnomme « le tombeau de ma garde », le Kaiser Guillaume Ier demande la cession de Gravelotte et des villages voisins en échange de Belfort, qui resta française. De nombreux monuments commémoratifs furent élevés à la mémoire des soldats allemands tombés, soit sur ordre officiel soit via des souscriptions populaires ou des associations d’anciens combattants.

Le monument le plus important est « la Halle du Souvenir ». Ce mausolée fut inauguré en 1905 par l’empereur Guillaume II en personne. On y retrouve des tombes de soldats ainsi que des stèles commémoratives. Il constitue désormais un lieu de paix et de recueillement pour l’Allemagne et la France.

Itinéraire

Vous pouvez stationner sur la droite en arrivant de Metz le long de la D603, la « voie de la Liberté », 1 km avant le bourg de Gravelotte, au niveau d’un cimetière militaire. Vous apercevez alors des tombes et un mémorial du régiment d’infanterie poméranien ainsi que des panneaux explicatifs de la bataille. À cet endroit vous êtes sur le lieu des combats. Les tombes sont des ossuaires de soldats français et allemands, unis pour l’éternité à l’endroit où ils sont tombés. Ces monuments ont été aménagés entre 1870 et 1914. Les batailles de la guerre franco-prussienne sont particulièrement sanglantes en Lorraine. Apres le conflit, des unités érigent des mausolées rappelant le sacrifice de ses soldats, souvent à l’endroit où les morts du régiment ont été inhumés. Le secteur autour de Metz rassemble la plus grande concentration de monuments militaires en Europe.

Prenez à droite en direction de la ferme de Moscou sur 50 m et tournez à droite pour rejoindre la clairière. Sur votre gauche se trouvent des ossuaires et deux monuments, l’un pour les soldats allemands et le second pour les français. Gravelotte ayant été du côté allemand pendant l’annexion, cela explique la présence d’un nombre plus important de monuments allemands.

Revenez sur vos pas et continuez vers les fermes. Arrivé à la patte d’oie, prenez à droite un chemin qui continue sous les arbres. Sur la droite vous pouvez apercevoir l’entrée d’un bunker souterrain, vestige de la militarisation de la région de Metz par la France et l’Allemagne. Cet endroit a été le théâtre de batailles très violentes entre le 27 août et le 13 décembre 1944, Hitler ne voulant pas abandonner Metz aux alliés.

Continuez sur 200 m : vous trouverez le hêtre de la bataille, vieux de plus de 170 ans, témoin des combats fratricides entre Européens qui s’y sont déroulés.

Revenez sur vos pas jusqu’à la ferme et continuez vers la ferme de Moscou. Arrivé en haut du mouvement de terrain, vous aurez un point de vue sur une partie du champ de bataille transformé aujourd’hui en champ agricole. « Gravelotte ! Morne plaine ! » aurait pu écrire Hugo. Le bâtiment le plus proche est la ferme de Moscou, âprement disputée pendant la bataille et désormais propriété privée.

Revenez au parking et continuez vers Gravelotte le long de la D603. Sur la droite après le pont traversant le vallon de la Mance, surnommé« le ravin de la mort », se trouve le monument à la gloire du 8e Chasseurs de Rhénanie.

Son inauguration a lieu le 18 août 1897 dans un grand rassemblement populaire. Un discours rappelle que ce monument n’est pas « un édifice de prestige pour les vivants mais un autel pour les morts. C’est une exhortation venue des temps passés, comme une voix de l’éternité : n’oublie pas que tu es redevable à ton roi, reste ferme envers ton empereur et ta patrie. Nous avons le devoir de protéger ce monument. Nous devons encourager l’esprit allemand sur une terre allemande ». Ce message résonne particulièrement fort dans la Lorraine annexée, dont 22 % des habitants sont des Allemands immigrés de fraîche date.

Continuez la route jusqu’au sommet de la colline ; vous arrivez à Gravelotte. Sur votre droite se trouve le musée de la Guerre de 70 et de l’Annexion. Il faut prévoir trois bonnes heures pour visiter ce musée très intéressant. C’est l’un des très rares musées à évoquer cette période et le seul à relater cette bataille.

À gauche se trouvent un cimetière militaire, la nécropole nationale de Gravelotte ainsi que la Halle du souvenir. Cet édifice est le monument commémoratif le plus important de la guerre de 70. Il regroupe près de 7 000 dépouilles de soldats français et allemands décédés dans les combats. Il fut crée en 1873 par les Allemands et inauguré par l’empereur Guillaume II.

Gravelotte est un symbole très fort pour la France et l’Allemagne. Plusieurs générations nous séparent de 1870 mais cette histoire a forgé l’Alsace-Lorraine d’aujourd’hui.

Cette page d’histoire partagée entre la France et l’Allemagne a marqué profondément nos deux pays. Cette guerre a inspiré à Rimbaud son célèbre poème, Le Dormeur du val.

À voir aussi

  • Musée de la Guerre de 1870 et de l’Annexion, 11 rue de Metz – Gravelotte : tourisme-lorraine.fr
  • Découverte de la ville de Metz : la cathédrale, le Centre Pompidou-Metz, le Temple Neuf
  • Sites de la bataille de Verdun, en suivant l’itinéraire dédié.

Cartographie 

Carte IGN 3313E au 1:25 000

Bibliographie

Arthur Rimbaud, Cahier de Douai, 1870

Accès

Point de départ de l’itinéraire : Coordonnées GPS : 49°07’04’’N 6°03’07’’E

Vous pouvez stationner sur la droite en arrivant de Metz le long de la D603, la « voie de la Liberté », 1 km avant le bourg de Gravelotte, au niveau d’un cimetière militaire.

Matériel spécifique, équipement

Paquetage standard pour une randonnée à la journée et chaussures adaptées au terrain forestier.

Art de vivre

Lors de votre passage en Lorraine, n’oubliez pas de goûter la traditionnelle quiche lorraine ou une potée lorraine, plat typique hivernal des campagnes messines accompagnée d’un vin de Lorraine et suivie d’un dessert aux mirabelles.

Année où cet itinéraire a été parcouru

Janvier 2018

Adrien C.
Auditeur de la promotion Marc-Aurèle

Le Dormeur du val

C’est un trou de verdure où chante une rivière
Accrochant follement aux herbes des haillons
D’argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c’est un petit val qui mousse de rayons.

Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendue dans l’herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.

Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme :
Nature, berce-le chaudement : il a froid.

Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.

Arthur Rimbaud (1854-1891)
Octobre 1870

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